Histoires de vie, et de vies...
16 Octobre 2022
Il y a des jours où quand le jour se lève
On voudrait rentrer tout au fond d'un rêve
Et s'endormir lorsque le clocher sonne
Il y a des jours où l'on n'est plus personne...
Alors on ferme les yeux un instant
Quand on les rouvre tout est comme avant...*
Le monde convulse. La troisième guerre mondiale jette son ombre sur le présent, la planète brûle de souffrance. L'Arménie est menacée d'épuration ethnique, la démocratie taïwanaise tremble sous la menace des autocrates de Pékin, le port du hijab est devenu obligatoire dans les écoles de filles de Gaza, les homosexuels sont persécutés par les djihadistes dans des mises en scène barbares (avec la bénédiction des évangélistes), douze millions de filles (entendez par là "enfants") sont mariées chaque année, filles et femmes qu'on excise toujours au nom de la culture, les droits des femmes reculent aux États-Unis. Toujours, chaque jour, entre 6 000 et 12000 personnes meurent de faim.
Il n'a jamais été aussi crucial, dans nos temps modernes, de protéger les droits humains et de maintenir la paix. Sauver le monde.
Là-bas, pas si loin, les Ukrainiens ne plient pas sous le déluge des bombes poutiniennes, les Iraniens sont au cœur de leur révolte contre l'islamisme, les Afghanes encore debout face aux Talibans.
Ici même, en France, le 16 octobre 2020, Samuel Paty était sauvagement assassiné, décapité par des obscurantistes islamistes devant le collège où il enseignait la laïcité, la liberté de conscience, le droit à la caricature et la liberté d'expression. Ici, en France, on a des gens prétendument de gauche, ceux-là même qui, par une spectaculaire contorsion de méninges, prétendent commémorer la rafle du Vel d'Hiv sans prononcer le mot juif, des gens, donc, prétendument de gauche qui affirment rendre hommage à Samuel Paty sans parler de terrorisme islamiste.
Ici, en France, on a des gens prétendument de gauche qui préfèrent épouser la cause des tyrans déclenchant des guerres et envoyant moisir dans des geôles les peuples et individus qui se dressent contre eux, plutôt que les aider en leur donnant les moyens de résister.
Ici, en France, on a des gens prétendument de gauche qui appellent à la grève générale, à défaut d'avoir gagné les élections. Tout conflictualiser. Semer la division et le chaos. Sans se soucier de ceux qui galèrent et s'épuisent à cause de la pénurie de carburant. Sans la moindre solution pour venir à bout des périls qui nous menacent. Une prétendue gauche qui n'est plus guère qu'un nid d'idéologues assoiffés de pouvoir et prêts à tout brûler pour y parvenir.
Et c'est ainsi qu'ici, en France, on a des gens prétendument de gauche qui réduisent le combat des Iraniennes au libre port du voile, quand elles risquent leur vie pour le droit fondamental de vivre libres. Parce que c'est bien le propre de l'idéologie, tordre la réalité jusqu'à la torture pour qu'elle se plie à l'idée. Quitte à infantiliser les femmes pour mieux les dominer, prétendre qu'elles ne sont que victimes inconscientes d'une oppression systémique dont elles seraient incapables de se défendre seules. Les Iraniennes, soutenues par nombre d'Iraniens, héroïques, nobles, belles jusqu'à la blessure, les Afghanes qui, avec un courage inouï, tiennent tête aux Talibans, nous prouvent le contraire et nous obligent. Tant qu'elles ne sont pas libres, personne ne l'est vraiment. La résistance des Ukrainiens face au fascisme poutinien, aux viols de guerre, nous oblige. Viols de guerre aussi en Afghanistan, en Iran, au Congo, en Éthiopie... Tant qu'elles, tant qu'ils ne sont pas libres, personne ne l'est vraiment.
Le monde convulse, et l'ombre se fait glaçante. Parce que la liberté est universelle, plus que jamais, la solidarité universaliste est immensément, éperdument nécessaire. Pour que la lumière reprenne vie à l'horizon de notre humanité.
Ce 16 octobre 2022, sinistre jour anniversaire de l'assassinat par la folie islamiste de Samuel Paty, je rêve qu'une armée de vivants se lève pour affirmer qu'en aucun cas, le corps des femmes n'est un instrument de guerre, que la liberté des femmes ne souffre aucune discussion, que le droit à la caricature est essentiel comme il est essentiel de savoir penser contre soi-même, accepter d'être contredit, accueillir la complexité du monde. Une armée de vivants qui tient la laïcité pour ce qu'elle est, un espace d'ouverture, de partage et de générosité. Et de libre expression, fût-elle moqueuse.
Alors non, je ne me contente pas de taper sur les gens prétendument de gauche, j'adresse les mêmes reproches à l'extrême-droite. Non, je ne me trompe pas de combat, ni d'ennemi. Mon combat est celui de tous ceux qui refusent d'assujettir leur pensée à un dogme, une idéologie, une doctrine.
Alors oui, je sais bien, dans le chaos ambiant, mes mots sont dérisoires, plutôt inutiles, mais ils sont à moi et je les livre aux quatre vents du net, en me disant qu'après tout, si c'est inutile c'est tout autant indispensable, et que, peut-être, sait-on jamais, ils ne seront pas perdus pour tout le monde. Histoire de dire mon soutien, sortir du rêve, m'offrir une joie, et tendre cette joie à qui voudra la prendre.
* Yves Duteil, Mélancolie
Dessin de Shamsia Hassani, première street artiste afghane https://www.shamsiahassani.net/
Athée, laïque, féministe assurée et romantique assumée, universaliste, républicaine, rieuse et mélancolique, résolument positive dans un monde dépressif, agitatrice de cervelle, gratteuse infatigable du vernis des humains pour voir ce qu'il y a dessous...
"Je ne fais effort ni pour qu'on m'aime ni pour qu'on me suive. J'écris pour que chacun fasse son compte." Jean Giono
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