Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Histoires de vie, et de vies...

Quincado? Merci, sans façon.

Illustration: Okalinichenko

Illustration: Okalinichenko

Quincado. Rien que le mot me chiffonne, et je n'aime pas être chiffonnée, si ce n'est par la main du Paladin. Comme je l'ai déjà dit quelque part, on a bien assez d'une adolescence dans une vie; et qui veut donc nous faire croire que cet âge est un paradis perdu?

Tout a commencé avec un article relayé par une amie quinqua sur FB. D'abord j'ai souri, amusée. Ensuite je me suis agacée. Et même, j'ai détesté. Parce que je crois aux mots, à l'importance des mots dans une vie, à l'influence qu'ils peuvent avoir sur une vie. J'ai en tête certains mots, certaines phrases tellement exactes, tellement rondes qu'elles ont dessiné des voies lactées dans mon ciel, des mots qui ouvrent des voies, qui donnent des ailes, qui poussent à oser.

Mais les mots qui étiquettent, qui rangent, qui plient les êtres comme des pulls (fussent-ils en cachemire double fil) à glisser dans des tiroirs, les phrases qui plombent, qui nivellent, les phrases qui définissent les modes et le flot commun, je les fuis. 

Cette phrase de Nuala O'Faolain, par exemple, me gêne aux entournures: "la cinquantaine, c'est l'adolescence qui revient de l'autre côté de la vie". Alors quoi, retour à l'âge de crise, du plaisir immédiat et transgressif, de la vue à court terme, du narcissisme? Ben... non. Moi d'abord, ça ne me vient pas, ça ne me va pas. Est-ce parce que mes cinquante-cinq ans demeurent habités par la bienheureuse petite inquiétude de l'amour? Sans compter cette autre, d'inquiétude, qui ne cessera qu'avec mon souffle, l'inquiétude maternelle... Moi d'abord, allons, c'est une blague?

Cette autre phrase: "la cinquantaine, c'est l'adolescence avec une carte bleue" (F. Foresti), là, carrément, elle me navre. Non que je crache sur les sous, c'est pratique les sous, mais  on ne va quand même pas réduire une vie à ça. On paie déjà pour tout, continuellement, en toutes circonstances, cher, très cher, trop cher, on paie pour voir, pour sortir, pour boire, pour bouger, et même pour faire pipi!!! En résumé, si tu consommes et sur-consommes, tu vis, sinon, tu as raté ta vie. Et pourquoi pas résumer une vie et sa réussite à la possession d'une Rolex, tant qu'on y est?

Non, je ne suis pas ça, je ne suis pas que ça. Je refuse d'être réduite à une catégorie. 

Je suis moi. Je vieillis. Ça se voit? Ben oui, tiens! J'ai la tête que j'ai, la tête de mon âge. Et alors, quoi de plus normal? Vraiment, le culte du jeunisme m'agace. Pire, je crois sincèrement que se penser ado avec trente-cinq ou quarante ans de retard, ça mène tout droit au gâtisme.

Non, je ne suis pas passéiste. Non, je ne refuse pas d'être moderne. Oui, j'ai envie de jouir de la vie, encore, et encore! Je ne m'en prive d'ailleurs pas. Je n'ai pas pour autant envie de squatter la place de ma lumineuse fille, elle qui affiche santé et beauté resplendissantes (insolentes diront les quincados), qu'aucune aiguille ou photoshop n'a besoin de retoucher!

Moi, sa mère, je suis au temps de l'entre-deux. Plus très jeune, pas encore vieille. J'ai perdu mes joues lisses et pleines, mais à l'intérieur, la fraîcheur est intacte, la seule qui compte, celle du désir, le désir de tout ce qui est beau, et bon, et grand. J'avance, c'est tout. 

Je m'aime bien, au fond. Je n'ai rien de fantastique, mais je continue à bien m'aimer. Telle que je suis, doucement, tendrement vieillissante.

Et vous? La tendresse?

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
À propos
La Baladine

Athée, laïque, féministe assurée et romantique assumée, universaliste, républicaine, rieuse et mélancolique, résolument positive dans un monde dépressif, agitatrice de cervelle, gratteuse infatigable du vernis des humains pour voir ce qu'il y a dessous... "Je ne fais effort ni pour qu'on m'aime ni pour qu'on me suive. J'écris pour que chacun fasse son compte." Jean Giono
Voir le profil de La Baladine sur le portail Overblog

Commenter cet article
A
Mouais, je n'aime pas trop ce genre de discours étant une éternelle révoltée mais je suis d'accord à propos d'etre réduit à des phrases et rangé dans des cases, moi c'est le mot "génération" qui m'exaspère.
Répondre
L
Bonjour quatre lettres! Eternelle révoltée? Mais contre quoi au juste? Il semble permis de poser la question... :-)
H
J'ai dépassé la cinquantaine, j'aborde un autre rivage, moins joyeux mais je profite de chaque moment de tendresse, le temps file vite.
Répondre
L
C'est sûr qu'objectivement, ce n'est pas si rigolo d'avoir de moins en moins de temps devant soi... Mais la tendresse oui, comme autant de petites bulles de bien-être!
M
La tendresse pour soi fait beaucoup de bien, chaque âge a ses joies et ses bonheurs, n'essayons pas de les rassembler tous en une zone intemporelle!
Répondre
L
Eh bien en ce qui me concerne mes joies d'aujourd'hui n'ont pas grand chose de différent avec celles de mon enfance, de mon adolescence, de ma jeunesse, de ma vie d'adulte etc. C'est juste que plus le temps passe, plus je les savoure...<br /> Vautrée? Mécékoi? Je me love je m'allonge je m'enroule je me blottis parfois, mais je ne me vautre pas. Comme quoi, "chacun fait c'qui lui plaît"!<br /> ;-)
A
chaque age a ses joies, je me demande quelles sont celles de l'age mur, si c'est à quoi je pense j'ai hélas eu l'enfance et l'age adulte dès le début gaspillés à ne vivre que ça, les petites joies gratuites, une verveine et au lit, partage et confiture ! quelle tristesse :/ (c'est pourquoi la mienne d'adolescence a été explosive et dévastatrice, il me fallait fuir ce tombeau, mais je n'ai pas pu m'en extirper c'est un autre débat) puis hein, j'aimais déjà me vautrer devant derrick ou le catalogue de la redoute avec un chocolat chaud à 15 ans dans les moments de lose et flemme, c'est bon j'ai donné, ça et tout le reste.
L
Oui, oui, soyons occupé(e)s à vivre plutôt qu'à paraître!
J
Pas envie de tricher, maudite tablette et son clavier capricieux !
Répondre
L
Pas grave, j'avais saisi! J'ai souvent les doigts qui courent plus vite que les mots... ou le contraire!
J
Moi, j'avance sur le chemin de la vie, en accueillant les plaisirs de chaque année qui passe. Pas de nostalgie, pas d'envie de paraitre plus jeune que je ne suis, pas envie de tricheri avec moi, ni avec les autres.<br /> J'adore la phrase, je n'ai rien de fantastique ! Et tant mieux, je préfère l'authenticité. Bon week end
Répondre
L
La nostalgie ne m'effraie pas, tant qu'elle est souriante! Mais surtout pas de regrets, ça tue, les regrets!<br /> bon week-end à toi aussi, authentique Rieuse!
L
La nostalgie ne m'effraie pas, tant qu'elle est souriante! Mais surtout pas de regrets, ça tue, les regrets!<br /> bon week-end à toi aussi, authentique Rieuse!
L
Et ne me parle pas de tendresse bordel !<br /> ("une petite camomille, ça doit pas être dégueulasse...")
Répondre
L
Ha ha! J'avais bien aimé le film, à l'époque!
L
" "la cinquantaine, c'est l'adolescence qui revient de l'autre côté de la vie". Alors quoi, retour à l'âge de crise, du plaisir immédiat et transgressif, de la vue à court terme, du narcissisme? Ben... non."<br /> <br /> C'était vraiment ça, ton adolescence ?<br /> C'est apparemment très différent d'un individu à l'autre.<br /> J'ai souvenir d'un type pour qui c'était surtout une période de doute, de crainte, d'espoir, de rêve mais que ça n'empêchait pas de faire des bêtises.<br /> Ce fut même un moment où on pouvait à la fois être très heureux et très malheureux.<br /> Le "quincado", à mon sens, c'est surtout quelqu'un qui essaie de croire qu'au lieu de ressentir un peu de regret de jours où on n'avait mal nulle part sauf parfois au cœur, on peut le revivre.<br /> Être "quincado" c'est seulement être déconnecté de la vraie vie.<br /> Suffit de se rappeler sa peau à 17 ans après une nuit brève, réparée illico d'un coup de gant de toilette et de constater à 50 ans qu'il faut deux nuits de 12h et une douche d'une heure pour avoir de nouveau figure humaine pour se rendre compte que "quincado" c'est d'abord une opération de marketing des éditeurs de bouquins de "bien être"...<br /> Non ?
Répondre
A
PS : pour moi la vraie jeunesse c'est ça, ne pas se rendre ni consentir. la révolte. <br /> l'adolescence des quincados comme la résignation triste ou partage confiture, c'est un truc de vieux, et dans leur cas, un truc de branleur friqué. sur ce point je rejoins vos avis sur l'aspect totalement création marketing du truc.
A
pour moi l'adolescence c'était génial, j'tais mal dans ma peau mais ça avait commencé à l'enfance et je le serai toute ma vie j'ai toujours mes anciens complexes avec la peau moche les dents manquantes et la cellulite aux bras en plus, la seule chose qui aille dans mon sens est que j'ai enfin perdu mon air trop gentil et mal dégrossi j'ai plutot l'air barré, pensif ou étrange maintenant, mais plus neuneu.<br /> mais en contrepartie j'avais des reves intenses et de grandes illusions, un mélange permanent d'enthousiame et de tourment, un refus d'etre consentante à la glauquerie mesquine de l'existence et aux courses chez lidl pour tout horizon, j'entrais dans la pauvreté mais croyais encore pouvoir y échapper et puis je savais que j'étais jeune et j'en étais soulagée de ne pas etre dans l'état des adultes et des vieillards quel que soit leur age, c'était toujours ça, j'vais toujours le temps de trouver une solution, guérir de ma psychose de mes angoisses de mes traumatismes les transmuter en art, il existait un avenir où je ne serais ni vieille ni moche ni précaire ni fatiguée il y avait de la magie partout. <br /> ça m'étonnerait qu'à la cinquantaine on puisse ressentir ça si vivement à moins d'avoir la chance d'avoir bossé comme un furieux dans un domaine dévolu à la logique au lieu de vivre comme un poete et de se lâcher enfin sur le tard quand on est assez plein de fric pour ne pas se heurter tous les 3 pas à une porte fermée, qu'on a un beau logement dont on peut s'éloigner l'esprit tranquille et où on peut se ressourcer rien qu'en y entrant, qu'on peut voyager, revivre ses reves, bref. <br /> Entre deux mal etres je prefere celui qui peut mener à un meilleur avenir et pas à la sagesse forcée.
L
Je voulais surtout, je l'ai sans doute mal exprimé, parler de cet entre-soi assez exclusif qui me parait propre à l'adolescence, en tout cas ce le fut pour moi et mes cops... avec pas mal de mal-être, et ça ne me donne pas envie de retourner à cet état d'esprit. <br /> "Déconnecté de la vraie vie", le quincado, c'est certain. Et que ce soit une opération juteuse, nul doute non plus, il n'est qu'à voir le boum de la "silver" économie!<br /> Ta définition m'a bien fait rigolé, en attendant!