Histoires de vie, et de vies...
8 Septembre 2016
"Dis donc, toi, tu n'as pas grossi... Tu manges, au moins?"
Toute fille filiforme s'est un jour trouvée confrontée à cette question. A fortiori quand elle est devenue femme, et qu'ayant manifestement franchi le cap fatidique de la ménopause, elle s'obstine à trimballer une silhouette plus évocatrice d'Audrey Hepburn que de Marilyn Monroe.
Variantes santé: "tu ne sautes pas de repas?", "ce serait bien que tu grossisses un peu", "tu as l'air fatiguée", "tu devrais faire du sport" (euh... du sport j'en fais, depuis toujours) etc.
Variantes allure : " tu fais petite chose", "on te souffle dessus il ne reste plus que les chaussures", "une vraie femme a des formes" et son corollaire "les hommes préfèrent les femmes qui ont des formes", (m'en fous, le Paladin m'aime pour ce que je suis, et toute entière, na!)...
Variantes envie : "tu as de la chance, tu peux manger ce que tu veux sans prendre un gramme", ou encore "tu n'as même pas besoin de faire de l'exercice pour être mince"...
Variantes psy de bazar: "tu n'es pas gourmande"... (sous-titre, tu n'aimes pas manger, tu passes ton temps à te surveiller, tu n'es pas sensuelle, en raccourci tu es psycho-rigide...)
Si, si, j'ai entendu tout ça.
Je sais, ce n'est pas forcément méchant. Encore que...
Quoiqu'il en soit, c'est souvent dévalorisant, parfois culpabilisateur, et toujours désagréable...
Alors, une fois pour toutes: être mince, voire très mince, voire maigre, n'est pas forcément un choix. Etre ronde non plus, je présume. Je fus un bébé normalement potelé, puis une petite fille maigrichonne, puis une adolescente avec quelques rondeurs, puis une adulte mince. Voire très. C'est comme ça, je ne me suis pas faite toute seule, et n'ai aucun moyen de me refaire. Et pas vraiment envie. J'aime mon corps, aussi imparfait soit-il. Je n'ai que lui, et n'en aurai jamais d'autre, du moins dans cette vie. Avoir n'est d'ailleurs sans doute pas le bon terme. Mon corps ET moi, ça n'a pas de sens. Mon corps, C'EST moi, voilà la vérité. Je l'aime, je l'habite, je le respecte. Qu'il soit fin ou pas n'a rien à y voir. Il est comme il est, et c'est moi qui vis dedans. Quand on critique mon corps, mon poids, on me critique moi, et mon (supposé) mode de vie. C'est extrêmement désobligeant, et parfaitement injuste.
Je mange. J'aime ça. Mais si j'aime manger, je n'aime pas bâfrer. J'aime le plaisir, pas le payer.
Mon corps, c'est vrai, je le soigne, je le bichonne, le crème, le garde doux et parfumé. Et je bouge, parce que mon corps est articulé, et que je crains la rouille. Je bouge je marche je cours je me plie je m'étire je danse, je me fais du bien, je me fais plaisir.
Parce que, je suis désolée de vous le dire, mais la sensualité, ce n'est pas se goinfrer à chaque repas et se désoler devant chaque kilo qui s'accumule, ce n'est pas rester vissée sur sa chaise et gémir sur ses bras mous, son profil ventru et ses fesses en berne...
Alors oui, je mange comme je l'ai toujours fait, sans excès mais sans culpabilité, avec un plaisir inouï, surtout quand je peux manger avec les doigts, parce que les doigts, c'est beaucoup plus voluptueux. Et je bois, du thé, du vin, de l'eau, de la bière, du café, avec ou sans sucre, c'est selon l'humeur, un cocktail à l'occasion, et du chocolat tout fumant quand il fait bien froid. C'est dit.
Moyennant quoi je me sens bien dans ce corps-là.
Alors, fluette comme Audrey, charnue comme Marilyn? Franchement, quelle importance?
Si on cessait d'essayer de faire entrer les femmes dans un moule, une bonne fois pour toutes? Il y a des brindilles et des pulpeuses, des maigres et des plantureuses, des minces et des rondes. Et toutes peuvent être belles, à condition qu'on les laisse s'épanouir telles qu'elles sont, vraiment. Une femme épanouie dégage de la beauté, du charme, et une sorte de puissance, qui naît de la confiance qu'elle possède en elle-même. Rien à voir avec sa morphologie.
Il faut s'affranchir du regard d'autrui. Des jugements extérieurs. Et des modèles. La beauté est multiple, diversifiée, et propre à chacune, à chacun.
Soyez vous-même, faites-vous plaisir, soyez belles, beaux, soyez libres!
Athée, laïque, féministe assurée et romantique assumée, universaliste, républicaine, rieuse et mélancolique, résolument positive dans un monde dépressif, agitatrice de cervelle, gratteuse infatigable du vernis des humains pour voir ce qu'il y a dessous...
"Je ne fais effort ni pour qu'on m'aime ni pour qu'on me suive. J'écris pour que chacun fasse son compte." Jean Giono
Voir le profil de La Baladine sur le portail Overblog