Histoires de vie, et de vies...
20 Novembre 2016
Je n'ai pas regardé "Carole Matthieu" l'autre soir sur ARTE. Je n'irai pas non plus le voir au cinéma. J'ai bien noté la dimension sociale des films de Louis-Julien Petit (voir "Discount"). Je lirai le livre dont il est adapté, "Les Visages Ecrasés" de Marin Ledun (éditions du Seuil).
Je ne remets pas en cause le talent d'Isabelle Adjani. J'ai fait un effort pour "La Journée de la Jupe", et elle est toujours excellente. Mais plus le temps file, et plus son visage me fait flipper. Soyons clairs: ses kilos en plus ou le contraire, je m'en balance!
Mais ce visage... Une bouche qui n'a pas grand chose à reprocher envier à celle d'Emmanuelle Béart, des joues... plus lisses que celles de sa jeunesse, la vraie... et pas la moindre griffe au coin des yeux... Un masque bouffi percé d'un regard, toujours bleu, toujours limpide, certes. Mais...
Ça me colle un malaise; ça me pose un problème. La beauté ne serait-elle propre qu'à la jeunesse?
D'accord, la société nous renvoie une image désastreuse de l'âge: rides, peau flasque, maladies, solitude, silence... Et il est aisé de concevoir que ça puisse être encore plus difficile pour quelqu'un qui fait de son physique son fond de commerce. Mais pourtant, des femmes comme Adjani, Béart, Nathalie Baye et autres Fanny Ardant, pour ne citer que des Françaises, renvoient plutôt une image d'ouverture, d'altruisme, de joie de vivre, quand elles ne nous pondent pas de jolis discours sur le bonheur d'avancer en âge... Alors?
Qu'est-ce qui pousse des femmes à priori intelligentes, assurément talentueuses, dont on peut penser qu'elles n'ont rien à prouver, à se laisser imposer ce masque figé, ce front lissé, ces pommettes élargies, cette bouche tuméfiée à grands coups d'aiguilles mercantiles?
On fait l'apologie de l'âge, mais on triche sur sa représentation. Cherchez l'erreur. Et la jeunesse, la vraie, à qui va-t-elle bien pouvoir s'identifier, si ses aînés ne sont plus que de tristes clowns clones d'eux-mêmes?
Revenons à nos actrices, ces manières d'emblèmes. Elles sont lisses, mais elles ne sont plus jeunes, et, ça me navre de le dire, elles ont perdu l'essentiel de ce qui faisait leur beauté.
Parce que la beauté, la vraie, n'a pas besoin d'être jeune, lisse, tendue, ou même photogénique. La beauté ce n'est pas du papier glacé, elle prend racine bien ailleurs que dans le grain de peau ou la perfection d'une silhouette.
La beauté c'est la chair, la lumière, l'expression, ce qui se reflète sur un visage, dans un sourire, un port de tête, de bras, une taille ployée, une courbe inattendue, des pleins et des déliés, une grâce, un pli... La beauté se moque de l'âge comme de colin tampon. C'est un visage qui dit les sentiments, la vie, avec ses joies et ses souffrances. La beauté c'est l'amour de la vie, une vie qui se lit dans le creuset des rides, aussi.
La beauté habite tous les âges, toutes les peaux, qu'elles soient fraîches ou fripées, toutes les couleurs, toutes les chevelures, et même l'absence de chevelure...
A quoi bon avancer masqué, lifté, botoxé, ripoliné? La mort est au bout de tous les chemins. La vie est si courte, le chemin si petit, à quoi bon perdre son temps à courir après une jeunesse qu'on ne rattrapera de toute façon jamais?
La beauté, la lumière, la vie m'éblouissent chaque fois que je regarde le visage vieilli d'Audrey Hepburn. Elle n'avait pas peur de la vie. Elle n'avait pas de temps à perdre.
Belle dans sa vérité.
Athée, laïque, féministe assurée et romantique assumée, universaliste, républicaine, rieuse et mélancolique, résolument positive dans un monde dépressif, agitatrice de cervelle, gratteuse infatigable du vernis des humains pour voir ce qu'il y a dessous...
"Je ne fais effort ni pour qu'on m'aime ni pour qu'on me suive. J'écris pour que chacun fasse son compte." Jean Giono
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